La suite de la serrure

"Rendez-nous le chat" "Le champomy d'abord!"

Donc il est finalement revenu avec la porte, tout va bien, tralala, je passe un bon dimanche.

Lundi vers 15h, Ousmane m’appelle.

« Anne, je n’arrive pas à ouvrir la porte. »

J’essaye de cacher l’ampleur faramineuse de mon soupir et lui dis que je verrai ça en rentrant, qu’il n’a qu’à venir au bureau, et raccroche en me disant que je tiens là un sacré boulet.

A 18h30, alors que la nuit tombe, que le muezzine appelle ses ouailles et qu’Ousmane est parti « casser le jeûne » (c’est le Ramadan) chez un confrère mohamétan, je fais moins la maligne. Il est effectivement impossible d’ouvrir la porte, la clé ne tourne pas dans la serrure. Misère de misère. Seul le chat me nargue en faisant des va-et-vient virevoltant par le trou de la moustiquaire. Etienne (le gardien ce jour-là) arrive avec la daba (truc de jardinage) :

« Anne, il faut casser la porte ! »

« Oooohlà, ooohlà on se calme, appelons-donc le chef de projet d’abord ».

Le chef de projet (Augustin) confirme et me rassure :

« Ne t’inquiète pas, ici c’est vraiment de la merde les serrures, elle va se casser facilement. »

Il décide tout de même de venir voir.

Et voilà qu’Etienne sort de sa cahutte avec un vieux fusil rouillé et nous dit d’un ton sans appel :

« Avec ça, c’est bien. »

« Oooohlà, ooohlà, on se calme, c’est quoi ce truc ? »

« Ne vous inquiétez pas, il est cassé » répond-il en pointant le tromblon vers moi. (J’ai presque envie de rajouter « Ne vous inquiétez, ma p’tite dame », mais j’ai peur que ça fasse trop).

En utilisant le fusil comme pied de biche, la porte céda effectivement assez facilement.

Je laissai donc une chance à Ousmane de se rendre utile en gardant notre maison sans porte, puis partis manger des crêpes chez Augustin pour me remettre de ces émotions.